Browning

Y avait qu'à r'garder sa figure

Et tout de suite on comprenait :

Monsieur Browning, qu'on l'appelait,

Un nom qui sentait l'aventure.

C'était le roi du revolver.

Il en avait de magnifiques

Qu'il avait ram'nés d'Amérique,

Où qu'on fabriqu' les vrais gangsters.

Il nous racontait son histoire,

Son premier crim' et puis la gloire,

Browning, Browning.

Il nous montrait des tas d'photos

Pris's en premièr' pag' des journaux,

Browning, Browning.

Il nous disait : "Vous autr's en France,

Vous manquez encor' d'expérience.",

Browning, Browning.

Avec ça, pas besoin d'êtr' fort.

C'est l'maladroit qu'a toujours tort

Et viv' Browning.

Parc' qu'il avait de l'élégance

Et des costum's de cinéma,

Il nous r'gardait de haut en bas

Avec mépris et insolence

Et tout's nos femm's, ell's l'admiraient

"Ah ! comment c'est qu'il a d'allure

Et ce typ' là, quelle envergure."

Mais nous, les homm's, il nous courait.

C'était toujours la mêm' histoire :

Son premier crim' et puis la gloire,

Browning, Browning.

On l'voyait sur les grands journaux,

Juste à côté d'Greta Garbo,

Browning, Browning.

A l'écouter, on d'venait bête.

On n'avait plus qu'ça dans la tête,

Browning, Browning

Et nous pensions "Marre à la fin !

Il nous ennuie, l'Américain

Et son Browning."

Pour nous apprendr' la vraie manière,

Pour nous donner un' bonn' leçon,

Il a tenu, ce brav' garçon,

A nous montrer son savoir-faire.

C'est dans un' sall' de restaurant

Qu'il a voulu fair' l'expérience,

Mais le pauvr' typ' n'a pas eu d'chance.

Comme il sortait ses instruments,

Il a roulé sous la banquette

Avec un p'tit trou dans la tête,

Browning, Browning.

Oh ça n'a pas claqué bien fort

Mais tout de mêm', il en est mort,

Browning, Browning,

Et puis quelqu'un dans le silence

A dit "Maint'nant à quoi qu'tu penses,

Browning, Browning ?"

Il pens' plus rien puisqu'il est mort.

Tu parlais trop... ben t'as eu tort.

Bye-Bye, Browning.