J'entends la sirène

J'entends encore la sirène

Du beau navire tout blanc

Qui, voilà bien des semaines,

Va des Iles sous le Vent

Lorsqu'à la marée montante

Il entra dans le vieux port

Je riais, j'étais contente

Et mon coeur battait très fort.

Le vent chantait sur la dune

Et jouait avec la mer

Où se reflétait la lune.

Dans le ciel, tout était clair.

Le premier qui vint à terre

Fut un jeune moussaillon,

Le deuxième, un vieux grand-père,

Puis un homme à trois galons.

Donnez-moi, ô capitaine,

Du beau navire tout blanc

Qui venait des mers lointaines,

Un beau marin pour amant.

Je l'attendrai sur la dune,

Là-bas, tout près de la mer.

Au ciel brillera la lune.

Dans mon coeur tout sera clair.

Il est venu, magnifique,

Avec une flamme... en Dieu,

Venant des lointains tropiques,

Savait des mots merveilleux,

Me piqua toute une bague,

Me jura d'éternels serments

Que se répétaient les vagues

En clapotant doucement.

Nous étions seuls sur la dune.

Le vent caressait la mer.

Dans le ciel riait la lune

Et lui mordait dans ma chair.

Il partit sur son navire,

Son beau navire tout blanc

Et partit sans me le dire,

Un soir, au soleil couchant.

J'entends toujours la sirène

Du bateau qui l'emporta.

Sa voix hurla, inhumaine,

"Tu ne le reverras pas !"

Et, depuis lors, sous la lune,

Je vais écouter le vent

Qui vient le soir, sous la dune,

Me parler de mon amant.