Vu de ma fenêtre
Vu de ma fenêtre
Vu de ma fenêtre, y'a que des bâtiments,
Si j'te disais que je vois de la verdure, tu saurais que je mens,
Et puis pour voir un bout de ciel, faut se pencher franchement,
Vu de ma fenêtre, y'a des petits qui font du skate, ça fait un bruit, t'as mal à la tête,
Et puis y'a des gars en bas qui galèrent,
Ils sont là, ils font rien, ils prennent l'air,
Surtout le printemps, surtout l'été, surtout l'automne, surtout l'hiver,
Vu de ma fenêtre, y'a vachement de passage, de Carrefour à la mairie je vois des gens de tout âge,
Du métro à la boulangerie, je vois toutes sortes du visages.
Et puis en face bien sûr, y'a Vidéo-Futur, toute la nuit, les mecs s'arrêtent devant en voiture,
Franchement le patron, il doit être blindé,
Moi aussi quand je serai grand, je veux vendre et louer des DVD.
Je suis aux premières loges pour les arrachages de portables, j'ai une vue très stratégique,
Si j'étais une poukave, je louerais mon appart comme planque aux flics,
Vu de ma fenêtre, y'a le café de France, juste en bas, à deux pas,
Il est tenu par des Rebeus, j'te jure, ça s'invente pas.
Y'a des meufs bien coiffées qui viennent prendre un café,
Y'a des petits couples sereins qui viennent boire un coup avant d'en tirer un,
Et y'a des gentils poivrots qui viennent oublier leurs galères dans la bière,
Surtout le printemps, surtout l'été, surtout l'automne, surtout l'hiver.
Aux beaux jours, ils mettent même des tables en terrasse,
Vu de ma fenêtre, y'a plein de monde au soleil c'est ma classe,
Et comme je vois tout, de ma planque, comme un keuf,
Mes potes m'appellent avant de venir pour savoir s'il y a de la meuf.
Vu de ma fenêtre, celui que je vois le plus souvent c'est Ludo,
Il est gentil mais quand tu le croises c'est pas forcément un cadeau,
Si tu le supportes pendant une heure, j'te jure t'es costaud,
C'est le mec qu'on appelle la cerise sur le ghetto.
Vu de ma fenêtre, c'est pas de la télé-réalité, ni un sitcom d'AB Production,
Et je vois pas mal de gens qui triment et voient la vie comme une sanction,
Et même si face à la galère, ils préfèrent se taire, ils mettent pas de genoux à terre et le poing en l'air ils restent fiers,
Surtout le printemps, surtout l'été, surtout l'automne, surtout l'hiver.
Parce que oui, vu de ma fenêtre, je vois pas mal d'espoir,
Quand je vois le petit blond jouer au foot avec le petit noir,
Quand je vois des gens qui se bougent, quand je vois des gens qui se mettent des coups de pied au cul,
Pour sortir de la zone rouge, et pour que la vie vaille le coup d'être vécue.
Quand je vois ces deux hommes qui boivent un coup en riant, alors qu'ils sont soi-disant différents,
Parce que l »un dit « Shalom » et l'autre dit « Salam » mais putain ils se serrent la main, c'est ça l'âme de mon slam,
Je prends ça comme un bon signe, c'est peut-être un espoir infime,
Mais je te jure que je l'ai vu, c'est pas pour la rime.
Bon c'est vrai que vu de ma fenêtre, je vois aussi la galère, la misère, les suicidaires, et les retours au pays en charter,
Mais je suis un putain de rêveur, un grand optimiste, c'est une philosophie qui me suit,
Alors je me dis que ça peut s'arranger. J'espère donc je suis.
Vu de ma fenêtre, y'a que des bâtiments,
Si j'te disais que je vois de la verdure, tu saurais que je mens,
Et puis pour voir un bout de ciel, faut se pencher franchement,
Mais vas-y viens chez moi, on regardera par la fenêtre.
Tu comprendras pourquoi je rigole, pourquoi je crains, pourquoi je rêve, pourquoi j'espère,
Surtout le printemps, surtout l'été, surtout l'automne, surtout l'hiver.