Je suis un voyou

Ci-gît au fond de mon cœur une histoire ancienne,

Un fantôme, un souvenir d'une que j'aimais

Le temps, à grands coups de faux, peut faire des siennes,

Mon bel amour dure encore, et c'est à jamais

J'ai perdu la tramontane

En trouvant Margot,

Princesse vêtue de laine,

Déesse en sabots

Si les fleurs, le long des routes,

Se mettaient à marcher,

C'est à la Margot, sans doute,

Qu'elles feraient songer

Je lui ai dit " De la Madone,

Tu es le portrait !"

Le Bon Dieu me le pardonne,

C'était un peu vrai

Qu'il me le pardonne ou non,

D'ailleurs, je m'en fous,

J'ai déjà mon âme en peine

Je suis un voyou.

La mignonne allait aux vêpres

Se mettre à genoux,

Alors j'ai mordu ses lèvres

Pour savoir leur goût

Elle m'a dit, d'un ton sévère

"Qu'est-ce que tu fais là?"

Mais elle m'a laissé faire,

Les filles c'est comme ça

Je lui ai dit : " Par la madone,

Reste auprès de moi!"

Le Bon Dieu me le pardonne

Mais chacun pour soi

Qu'il me le pardonne ou non,

D'ailleurs, je m'en fous,

J'ai déjà mon âme en peine

Je suis un voyou.

C'était une fille sage,

A "bouch', que veux tu?"

J'ai croqué dans son corsage

Les fruits défendus

Elle m'a dit d'un ton sévère

"Qu'est-ce que tu fais là ?"

Mais elle m'a laissé faire,

Les filles c'est comme ça

Puis j'ai déchiré sa robe,

Sans l'avoir voulu

Le Bon Dieu me le pardonne

Je n'y tenais plus

Qu'il me le pardonne ou non,

D'ailleurs, je m'en fous,

J'ai déjà mon âme en peine

Je suis un voyou.

J'ai perdu la tramontane

En perdant Margot,

Qui épousa, contre son âme,

Un triste bigot

Elle doit avoir à l'heure,

A l'heure qu'il est,

Deux ou trois marmots qui pleurent

Pour avoir leur lait

Et, moi, j'ai tété leur mère

Longtemps avant eux

Le Bon Dieu me le pardonne

J'étais amoureux!

Qu'il me le pardonne ou non,

D'ailleurs, je m'en fous,

J'ai déjà mon âme en peine

Je suis un voyou.