Lyrics Thomas Fersen

Thomas Fersen

Ne Pleure Plus

La Seine est en crue,

La Seine est dans la rue

Les berges sont noyées

Et les arbres ont rouillés.

La Seine est dans la rue,

L'océan ne boit plus,

Les oiseaux se sont tus.

On t'a jeté du sable,

Un voyou t'a voulu

Une peine inconsolable

Dont tes yeux sont l'issue.

Et ta première larme,

Le caniveau l'a bue.

Ça n'était qu'une larme,

Ça n'était qu'un début

Car la Seine est en crue

La Seine est dans la rue,

L'océan ne boit plus

Et le Zouave éternue.

Pont Alexandre III,

Les lions sont aux abois,

Les chats sont sur les toits

Et les poissons chez moi.

Des pigeons confondus

Croient que l'heure a sonné,

Sur une branche de salut

Ils attendent Noé.

Ne pleure plus, ne pleure plus

La Seine est dans la rue,

On n'avait jamais vu

Autant d'eau épandue.

Un blanc sec sur le zinc

Vaut mille wassingues

Pour, toute peine bue,

En essuyer la crue.

Mais toi tu n'as pas soif,

Tu remplis les carafes

Et les carafes pleines

Tu remplis les fontaines.

Les miroirs ont ce charme,

Ils multiplient les choses

Se reflétant, tes larmes

Redoublent et arrosent

Ne pleure plus !

Un saule au bord de l'eau

Pleure de tristes rameaux.

Les rameaux c'est discret,

Toi tu pleures des forêts

Où revivent ces brocarts

Qui t'invitent à tuer

Et qui reviennent boire

À tes yeux embués.

Dis que tu pleures pour rire,

Ou pour mieux engloutir

Les violons du souvenir

Sous le pont des soupirs.

Tes éclats en sanglots

Bouleversent les marées,

Un cheval au galop

Est rejoint dans la baie.

Le marin ne sait plus

À quel saint se vouer

Voyant flux et reflux

Emporter ses bouées,

Emporter son chalut

Et sa coque trouée,

Lançant ses bras tendus

Et d'une voie enrouée :

"Ne pleure plus !"

Ne pleure plus, ne pleure plus,

Les digues sont rompues

Et des paquets de mer

Pèsent sur tes paupières,

Et les vagues déferlent

À la moindre risée

En cascade de perles

Comme un collier brisé

Par un joli voleur

Que la rue a instruit,

Qui maraude ton coeur

Comme un vulgaire fruit.

Est-ce le fleuve Amour

Qui roule ses eaux noires

De fleuve sans espoir

Dans le lit du trottoir ?

Ou ce sont les chimères

Plus douces que l'étreinte ?

Et ces larmes amères

Un caprice ? Une feinte ?

La fumée ou l'oignon,

La venue de l'automne,

La fin d'une chanson,

Pas grand-chose en somme :

Ne pleure plus !

Car la Seine est en crue,

La Seine est dans la rue

L'océan ne boit plus,

Les oiseaux se sont tus,

Ne pleure plus !